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Tendances de mobilité durable et intelligente

Responsable de 41 % des émissions annuelles de gaz à effet de serre (GES) au Québec, le transport représente un levier majeur pour répondre aux défis économiques et environnementaux des prochaines années. En parallèle, les nouvelles tendances sociétales et les ruptures technologiques actuelles accélèrent les changements dans la manière dont nous déplacerons les personnes et les biens.

 

Dans ce contexte, l’approche « Réduire-Transférer-Améliorer » (RTA, voir explication en bas de page) aide à regrouper et à analyser logiquement les défis de la mobilité urbaine durable et intelligente, à court et à moyen terme.

 

Bien que le transport des biens soit un sujet d’intérêt majeur chez Jalon, entre autres avec le projet Colibri, nous nous concentrerons davantage dans cet article sur la mobilité des personnes, pour laquelle nous croyons qu’il est nécessaire de relever les six défis suivants.

 

Réduire

  1. Une mobilité à l’échelle locale

Transférer

  1. Une mobilité plus active
  2. Des transports collectifs sur mesure
  3. La lutte contre l’autosolo

Améliorer

  1. L’électrification des véhicules
  2. Une ville connectée et intelligente

 

Une mobilité à l’échelle locale

Tendances

La meilleure solution pour réduire les émissions de GES restera toujours de réduire la quantité même de déplacements. Pour atteindre cette ambition, il convient soit de réduire les besoins de déplacement, soit de limiter les distances à effectuer, soit de diminuer la fréquence de ces trajets. Les entreprises ont par exemple un rôle clef à jouer en s’assurant de la qualité de l’accessibilité de leurs sites, en favorisant le télétravail, les tiers lieux comme les espaces partagés de travail et les horaires décalés ou en encourageant les solutions alternatives de mobilité. Ces programmes ont également des effets bénéfiques sur la qualité de vie, l’humeur des employés, ainsi que sur la capacité de rétention des entreprises dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre. À cet effet, des organisations, comme Jalon et les Centres de gestion de déplacement (CGD), travaillent de pair avec les entreprises afin d’établir des plans de gestion des déplacements qui prennent compte de l’ensemble de ces variables.

 

Le développement incessant des zones urbaines invite aussi à repenser la mobilité à des échelles plus petites. L’échelle du quartier ou un ordre de grandeur de 5000 habitants sont souvent évoqués pour qualifier des zones de vie disposant d’un accès aisé à la fois à des commerces, écoles, loisirs et pôles d’emplois… de proximité. Les aménagements urbains évoluent pour offrir une intégration plus humaine, plus équilibrée et plus efficace entre l’immobilier, les infrastructures et la mobilité. Les équipements liés à la micromobilité empiètent sur les rues et les nouveaux bâtiments sont conçus pour mieux intégrer les services de mobilité émergents.

Fort de l’engagement des citoyens, cette proximité de quartier permet de faire bouger les choses et entraîne le développement de nouveaux services d’entraide et de partage. Les déplacements sont naturellement un des premiers services à partager entre voisins.

 

Enjeux locaux et convictions Jalon

Dans le cadre du Défi des villes intelligentes du Canada, Montréal a proposé un volet « mobilité de quartier » visant à faciliter les déplacements de courtes distances au sein des quartiers et à offrir des solutions de mobilité locale adaptées aux réalités spécifiques de différents milieux de vie. Cela favorise l’inclusion de tous les habitants aux nouvelles mobilités et s’appuie sur la mise en place d’une plateforme de partage et de gestion des services ainsi que sur la constitution de flottes de véhicules autogérées comme un commun de quartier.

 

Dans le même esprit, nous avons développé le concept Im/mobility qui, de concert avec les promoteurs immobiliers, intègre une offre de services de mobilité dès la conception du bâtiment, partagée avec les autres propriétaires et comprise dans l’investissement financier. Un tel concept bénéficie donc à tous les acteurs (promoteurs, investisseurs-financeurs, propriétaires) et ouvre la porte à une réflexion sur les règles et les besoins d’infrastructures urbaines.

 

Le développement des micromobilités offre une diversité de nouveaux formats (trottinettes, vélos, mini navettes, éventuels pods…) pour effectuer le premier ou dernier kilomètre et éventuellement rabattre sur des modes plus lourds. Nous portons notre regard à la fois sur la conception et l’efficacité de ces véhicules, l’expérience offerte aux utilisateurs ainsi que sur leur intégration dans un environnement urbain qu’il est nécessaire de libérer de ses contraintes actuelles liées aux transports (prédominance des places de stationnement et voiries dédiées aux voitures).

 

Une mobilité plus active

Tendances globales

Le deuxième niveau de l’approche RTA consiste à encourager le transfert modal depuis des modes fortement émetteurs en GES, particulièrement l’autosolo, vers des solutions plus vertueuses telles que les modes doux, collectifs ou partagés.

 

La très grande majorité des déplacements urbains font moins de 5 km. Dans ce contexte, les solutions de mobilité active, notamment la marche et le vélo, sont le plus souvent les plus rapides, les plus simples et les moins chères. Au-delà de leur efficacité sur les courtes distances, ces modes apportent une réponse aux enjeux de santé urbaine. Fort de cette prise de conscience et de l’impact économique positif, les municipalités doivent encourager ces pratiques et repenser la place qui leur est dédiée dans l’environnement urbain.

Enjeux locaux et convictions Jalon

Les études menées sur ce sujet montrent que le développement des mobilités actives passe par la suppression d’un certain nombre de freins que nous résumons en quatre niveaux complémentaires.

  • Améliorer la disponibilité et la qualité des réseaux piétons et cyclables pour offrir une infrastructure avec une emprise en cohérence avec son usage par les citoyens. C’est notamment l’ambition du projet montréalais REV (Réseau Express Vélo) qui souhaite ajouter 150 km de voies cyclables supplémentaires aux 900 km existants.
  • Améliorer la cohabitation routière afin que chaque mode puisse évoluer en toute sécurité et sérénité sur la voirie. C’est l’ambition du projet montréalais Vision Zéro qui vise à réduire à néant le nombre de décès annuels sur les routes de l’île.
  • Développer des stationnements vélos sécurisés pour assurer aux cyclistes qu’ils disposeront de solutions à leur destination et qu’ils pourront y déposer leur vélo en toute quiétude, comme le projet de Vélo-Transit.
  • Développer des services complémentaires pour l’information, le transport de passagers ou d’objets, les nuisances physiques grâce des vestiaires, comme le propose Rinse, l’entretien et la réparation du matériel, ainsi que des assurances adaptées à ces usages.

 

Des transports collectifs sur mesure

Tendances

Les transports collectifs constituent la pierre de voûte de la mobilité urbaine. Ils offrent à la fois des solutions de masse le long des lignes structurantes, souvent portées par des modes lourds (train, métro, tramways), et des solutions complémentaires, de granularité plus fine, souvent portées par des modes plus légers (bus, navettes). Outre le développement de nouvelles lignes et de leur efficacité opérationnelle, les transports collectifs sont de plus en plus soucieux de leur attractivité au travers d’une expérience clientèle modernisée (information temps réel, confort d’attente et à bord, services associés…).

 

L’évolution des outils numériques permet de développer des offres personnalisées, telles qu’une information ou une tarification adaptée aux différents types de voyageurs ou aux différents usages. Cette personnalisation de l’offre se traduit aussi au travers de solutions de mobilité « à la demande » là où c’est pertinent. Les arrêts, les lignes, les horaires des bus deviennent ainsi virtuels et sont activés ou agrégés en fonction de la demande des utilisateurs.

 

Dans ce contexte, les navettes autonomes offriront un vaste champ de possibilités et une flexibilité supplémentaire pour répondre à la demande de mobilité, notamment dans les zones à faible densité, pour les enjeux de rabattement ou en cas de forte polyvalence des usages (par exemple, transport collectif aux heures de pointes et service dédié aux maisons d’aînés en journée).

 

Cette évolution du transport vers l’autonomie permettra une refonte complète de l’environnement des véhicules. Le conducteur sera libéré de sa tâche de conduite et pourrait se concentrer sur d’autres activités comme les services aux passagers. Dans le même temps, ceux-ci accéderont à un large éventail de nouvelles expériences à bord, allant du divertissement à l’optimisation du temps de travail.

 

Enjeux locaux et convictions Jalon

Montréal a déjà engagé de nombreux projets majeurs pour l’amélioration des transports collectifs (REM, SRB Pie-IX, prolongement de la ligne bleue, projet de ligne rose…). Nous entendons donc nous concentrer sur des solutions de transport à la demande et de navettes autonomes portées par les capacités en intelligence artificielle de Montréal.

 

Jalon soutient ainsi les expérimentations de navettes autonomes telles que celle du marché Maisonneuve à l’été 2019. Les considérations locales ont un impact direct sur le fonctionnement de ces véhicules, notamment les conditions météorologiques, la conception urbaine ainsi que la perception et les usages par les passagers.

 

Sur ce dernier point, Jalon poursuit son travail avec l’école de design de Nantes-Atlantique, basée à Montréal, pour imaginer les différents aménagements à bord possible et compte s’appuyer sur le pôle d’excellence montréalais dans l’animation, les effets visuels et les jeux vidéo pour explorer ces nouvelles expériences pour les passagers.

 

La lutte contre l’autosolo

Tendances

Saviez-vous que Montréal compte plus de 25 millions de sièges vides par an dans les déplacements quotidiens en voiture? Et qu’en moyenne, on retrouve 1,2 passagers par voiture en pointe matinale ? Cette emprise au sol (congestion et stationnement) et son coût public sont démesurés et doivent amener à la mise en place de solutions qui favoriseront des modes de déplacement plus durables et au bénéfice de l’ensemble des collectivités.

 

Parallèlement, on note une certaine évolution des comportements de la possession de biens vers la location ou l’usage de services en fonction des besoins. Cette tendance se confirme de plus en plus dans l’univers des transports. Les véhicules passent ainsi d’une propriété individuelle à une propriété de type flotte centralisée par des opérateurs. Les solutions de covoiturage, d’autopartage, de véhicules en libre-service et autres plateformes tendent également à réduire la possession de voitures.

 

Les citoyens peuvent se sentir démunis face à ce foisonnement d’offres. C’est pourquoi le développement du MaaS (Mobility as a Service) permettra de centraliser et de faciliter l’accès (information, réservation, paiement) à un portefeuille de solutions multimodales, publiques et privées, complémentaires. Il encouragera l’autonomie des usagers et le report vers les alternatives à l’autosolo.

 

Enjeux locaux et convictions Jalon

Dans le cadre du Défi des villes intelligentes du Canada, Montréal a proposé un volet « mobilité intégrée » (MaaS) visant à combiner de nombreux modes de déplacement déjà disponibles dans la grande région et à permettre aux utilisateurs d’accéder aisément à ces divers services, grâce à un compte mobilité unique, lié à une identité citoyenne partagée.

 

Si l’amélioration des solutions de mobilité alternatives et leur accès sont indispensables à l’intérêt et la rétention des citoyens disposés à jouer le jeu, nous sommes convaincus que la lutte contre l’autosolo est d’abord un enjeu psychologique. Au travers du Chantier autosolo que nous animons, nous cherchons ainsi à comprendre les freins et les motivations conscients ou inconscients et à déterminer les meilleurs mécanismes favorisant un transfert modal durable.

 

Outre les solutions technologiques ou s’intéressant aux habitudes, perceptions et comportements, il ne faut pas oublier également que la migration de l’autosolo vers des modes plus durables sera aussi encouragée par des mesures fiscales et législatives visant à faire payer aux automobilistes le coût réel d’utilisation de leur véhicule. Pensons par exemple aux stratégies de péages urbains, l’augmentation du tarif des vignettes de stationnement ou à la taxe kilométrique, dont l’implantation sera facilitée par l’arrivée de plusieurs technologies numériques.

 

L’électrification des véhicules

Tendances

Le troisième niveau de l’approche RTA consiste à améliorer l’efficacité des modes existants quand il n’est pas possible de réduire les déplacements ou de se reporter vers des solutions plus durables.

 

Dans ce contexte, l’électrification des véhicules offre une amélioration par rapport aux motorisations traditionnelles à essence grâce à une réduction des émissions locales de GES (au Québec, une voiture électrique qui roule 150 000 kilomètres produira 65 % moins de GES qu’une voiture à essence). Mais un véhicule électrique génère toujours les mêmes autres externalités négatives qu’un véhicule à essence (congestion, emprise au sol, sécurité routière…) et entraîne un certain nombre d’effets rebond (accroissement des usages, accroissement des inégalités, cannibalisation des transports collectifs…).

 

Plusieurs nouveaux petits acteurs industriels émergent à travers le monde avec des modèles d’affaires liés aux véhicules individuels. Afin de rattraper le temps perdu, les gros joueurs internationaux cherchent à acheter des solutions plutôt qu’à investir seul dans des exercices de R&D. En parallèle, le déploiement et les capacités des bornes de recharge s’accentuent et de nouveaux modèles commerciaux pour les achats d’énergie font leur apparition (réseau intelligent…).

 

Enjeux locaux et convictions Jalon

La province du Québec dispose de forces indéniables en faveur de l’électrification :

  • Une grande capacité de production d’énergie propre, renouvelable, à un coût stable et abordable ;
  • Une réelle qualité et fiabilité du réseau électrique ;
  • Un vaste réseau public de bornes de recharge ;
  • Une abondance des principaux minerais nécessaires à la conception de batteries.

 

De même, le Québec peut s’appuyer sur un bassin d’entreprises spécialisées dans la fabrication de systèmes de propulsion, de bornes de recharge, de véhicules et de leurs composantes.

 

Dans ce contexte, Jalon a la conviction que l’électrification des véhicules doit prioritairement passer par celle des flottes, publiques comme privées. Jalon a ainsi analysé différentes pistes de financement de projet possibles, y compris en utilisant le véhicule électrique comme une vitrine hébergeant de nouvelles technologies. En 2020, Jalon aimerait explorer l’idée de faciliter l’accès à ces nouveaux véhicules auprès des gestionnaires de flotte en permettant un usage temporaire (par exemple grâce à une location sur quelques mois).

 

Une ville connectée et intelligente

Tendances

Le concept de ville intelligente se caractérise par l’utilisation des technologies de l’information et de la communication pour améliorer la qualité des services urbains. Ses principaux bénéfices dans le domaine de la mobilité résident dans sa capacité à optimiser l’utilisation des infrastructures, à accroître la rapidité de réaction et la flexibilité d’interaction des différents intervenants, à améliorer la sécurité urbaine des biens et des personnes, et donc à limiter les coûts publics comme privés.

 

La chaîne de valeurs de la connectivité urbaine comprend :

  • La génération de données grâce aux véhicules de plus en plus connectés avec d’autres appareils (Internet of Things), d’autres véhicules (V2V), avec le réseau (V2N), avec d’autres infrastructures (V2I), etc.
  • La transmission des données grâce à l’émergence de nouvelles méthodes de connectivité (5G, LoRaWAN…) et l’évolution de méthodes existantes (Wi-Fi, Bluetooth, GPS, LTE, fibre…).
  • La collecte et le stockage d’énormes quantités de données qui doivent être nettoyées et structurées pour permettre une meilleure utilisation.
  • Le traitement des données comprenant à la fois l’analyse, la visualisation ainsi que des outils de prédiction et d’optimisation.

 

Enjeux locaux et convictions Jalon

Dans le cadre du Défi des villes intelligentes du Canada, Jalon est responsable du volet « données de mobilité » qui vise à créer et animer une bibliothèque de données en mobilité. L’objectif est de collecter, stocker et partager des données anonymisées des activités de mobilité pour notamment mener des études de cas, valider la performance de nouveaux modèles d’affaires, tester de nouveaux services de mobilité qui utilisent et/ou produisent des données.

 

Montréal peut s’appuyer sur une expertise scientifique de premier plan dans les domaines de l’intelligence artificielle, des solutions optiques et photoniques (LIDAR, radar, caméra…), et des nouvelles connectivités. Mais la plupart des fournisseurs de ces technologies ont besoin de données cohérentes générées par la conduite de véhicules et de tests de véhicules pour affiner des solutions. Dans ce contexte, Jalon est convaincu qu’il est nécessaire de développer des environnements de test urbains dotés de technologies de connectivité, d’intégrer une variété de partenaires et générer, transmettre, collecter et traiter les données de mobilité, comme le fait entre autres l’entreprise Jakarto.

 

 

Les prochaines étapes

L’ensemble de ces défis et l’approche RTA représentent à la fois l’ambition de Jalon pour une mobilité durable et intelligente ainsi qu’un outil d’analyse et de priorisation des projets dont Jalon encourage le développement. Dès 2020, Jalon organisera des ateliers thématiques permettant d’explorer ces défis et déterminer les moyens nécessaires pour y répondre. Cette démarche devra bien évidemment s’accompagner d’une stratégie de gestion du changement pour s’assurer de prendre en compte tous les paramètres et acteurs concernés puis accompagner la mise en œuvre de solutions jusqu’à la mesure de leur pertinence.

 

L’approche RTA est internationalement et reconnue reprise par des nombreux organismes tels que le Programme des Nations Unies pour l’Environnement, SLoCaT (Partnership on Sustainable Low-Carbon Transport), la Chaire de Mobilité de Polytechnique, la Politique Mobilité Durable du MTQ dont plusieurs mesures sont mentionnées dans cet article (https://www.transports.gouv.qc.ca/fr/ministere/role_ministere/Pages/politique-mobilite-durable.aspx)…

 
 

Publié le 23 décembre 2019

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